Le troisième exportateur mondial est très affecté par l’environnement international. Le Brexit et la menace de droits de douanes américains pourraient peser en 2019. Depuis près d’une décennie, c’était un mot presque banni du vocabulaire allemand, et pourtant, depuis le quatrième trimestre 2018, il est réapparu outre-Rhin et ne cesse aujourd’hui de hanter les esprits : «récession». Un comble, alors que la quatrième économie mondiale est considérée comme la locomotive de l’Europe et le capitalisme rhénan un modèle pour nombre de pays membres de la zone euro.
Le moteur a de sérieux ratés
De fait, au dernier trimestre 2018, l’Allemagne y a échappé de peu en enregistrant une croissance nulle après une contraction de 0,2% de son PIB au troisième trimestre (la récession se définit par deux trimestres consécutifs de baisse de l’activité).
Sur l’année écoulée, le PIB a tout de même progressé de 1,5%. Mais ce rythme, le plus faible depuis cinq ans, est loin des 2,2% relevés lors des deux années précédentes.
Ce ralentissement s’explique par une conjonction d’événements défavorables, dont l’entrée en vigueur, le 1er septembre 2018, de nouvelles normes d’homologation des véhicules qui ont fait chuter lourdement la production automobile, ainsi que la baisse du niveau du Rhin (à son plus-bas historique en raison de la sécheresse), qui a impacté le transport fluvial et l’approvisionnement de nombreux industriels.
Au-delà, après neuf années de croissance, le ralentissement cyclique est patent et surtout plus fort en Allemagne que dans le reste de la zone euro. Berlin n’attend plus que 1% de croissance en 2019, alors qu’il tablait sur 1,8% à l’automne dernier.
Des vents de face
«L’économie allemande est encore sur une trajectoire de croissance cette année, pour la dixième année d’affilée», a souligné Peter Altmaier, ministre de l’Économie. «Mais les vents de face se renforcent – les points principaux étant les conflits commerciaux, le Brexit et l’environnement fiscal international», avec la menace venant de l’administration Trump de droits de douane sur les importations d’automobiles européennes.
Dans son dernier rapport mensuel, la Bundesbank estime peu probable une embellie durant les mois d’hiver, mais ajoute toutefois que «rien n’indique que ce ralentissement se transforme en récession».
À n’en pas douter, ce nouvel environnement «met en évidence certaines fragilités structurelles : surexposition à la demande mondiale et au risque protectionniste, surreprésentation du secteur automobile dans l’activité totale», explique Bruno Cavalier, chef économiste d’Oddo BHF.
Les exportations du pays ne représentent-elles pas 44% du PIB (contre 30% pour la France) et le secteur automobile 13%, soit près d’un tiers des exportations ? Bref, «après avoir eu le vent dans le dos en 2017, l’Allemagne fait face à des conditions moins favorables».
La consommation en soutien
Si le commerce extérieur continue de peser, «le ralentissement devrait s’effectuer sans trop de heurts, estime le Crédit Agricole, qui ne verse pas dans le pessimisme.
L’augmentation des salaires et des emplois demeurera un facteur de soutien à la consommation en 2019 et 2020», principale composante de la croissance.
Et «les dépenses publiques sont attendues en légère accélération […], financées par l’excédent budgétaire accumulé ces dernières années, sans nuire à la trajectoire baissière de la dette qui devrait passer sous le seuil de 60% du PIB cette année».
En définitive, selon les prévisions du Crédit Agricole, l’activité devrait progresser de 1,3% en 2019 (comme en 2020), avec un taux de chômage à 3,2%, une inflation à 1,7% et un excédent budgétaire représentant 1,2% du PIB. Vous avez dit récession ?
Source: Le Revenu